12 octobre 2020 ; un mois déjà que le Conseil constitutionnel a donné son verdict. Sur la quarantaine de candidats, quatre (4) heureux élus. Il s’agit bien du candidat sortant, le président Alassane Ouattara, l’ex président Henri Konan Bédié, l’ex premier ministre Pascal Affi Nguessan et, enfin, de monsieur Kouadio Konan Bertin, ex député. Depuis lors, la décision du Conseil constitutionnel a connu mille et une interprétations. Pour l’opposition, cette décision autorisant la candidature du président sortant est anti constitutionnelle.
Estimant que les juges constitutionnels ont donné ‘’un coup de pouce’’ au candidat du RHDP, l’opposition ivoirienne tente une union sacrée en vue de ‘’sauver la république’’. Dans les faits, il s’agit de faire barrage au troisième mandat de monsieur Alassane Ouattara jugé ‘’anti constitutionnel.’’ Cette opposition s’est réunie ce 10 octobre au stade Houphouët Boigny pour se faire entendre aussi bien par l’opinion nationale qu’internationale. Cependant, à quelques trois semaines de cette élection, l’Exécutif ivoirien ne semble pas être dans une logique de report de cette élection. Dans un tel contexte, quels peuvent être les enjeux de la future présidentielle en Côte d’Ivoire ?
Pour l’opposition. Ayant tant bien que mal réussi sa mobilisation du 10 octobre, l’opposition rêve d’un report des élections. Malheureusement, il ne suffit pas de drainer 45 mille (?) militants et sympathisants au Plateau pour obtenir une telle revendication. Il faut bien plus et plusieurs de ses leaders le savent. Elle a besoin de temps et de réseaux à l’international ; ce qui manque. Dix années sans activité politique ont quelque peu déconnecté le peuple de ces leaders de l’opposition dont le discours a du mal à drainer du monde dans les rues. A cela s’ajoutent des craintes d’agression.
La stratégie véritable de l’opposition sera de jouer sur le taux de participation de sorte à décrédibiliser le vainqueur de la présidentielle à venir qui perdrait toute légitimité. Cela lui permettrait de maintenir la pression sur le pouvoir les cinq (5) années à venir en vue d’obtenir l’ouverture du jeu démocratique, le compromis politique, le retour de messieurs Laurent Gbagbo, Blé Goudé, Soro Guillaume, la libération des prisonniers politiques, le retour des exilés politiques… Le parti présidentiel en est conscient.
Pour le parti au pouvoir. A court terme, le RHDP cherche à profiter du probable boycott de l’opposition significative pour vite clore ce chapitre. Passé ce moment, il s’agira pour lui d’ouvrir un peu le jeu politique en gardant main basse sur la ‘’colonne vertébrale’’ du Centre de décision. Le RHDP travaille également à avoir un taux de participation honorable. Un taux en deçà des 25% pourrait faire pâlir plus d’un soutien parmi les Acteurs extérieurs.
Le RHDP va chercher, par la suite, à apporter une certaine révision constitutionnelle de sorte à mettre messieurs Gbagbo et Bédié à la retraite politique par la clause de la limite d’âge. Il devra s’atteler à reformer les institutions en charge d’organiser les élections.
Les institutions en charge d’organiser les élections. La Commission Electorale Indépendante (CEI) et le Conseil constitutionnel jouent leur crédibilité. La tâche ne parait pas facile pour une CEI au comité central où refusent de siéger les représentants de l’opposition. Le PDCI a également refusé de participer aux élections dans les CEI locales la mi-septembre. La CEI se donne également une semaine (14-20 octobre) pour partager 7 503 095 cartes, soit une moyenne de 1 071 871 cartes par jour !
Pour le Conseil constitutionnel, les choses ne sont non plus faciles. Après la liste des candidats à la présidentielle arrêtée le 14 septembre, les juges constitutionnels ivoiriens ont perdu toute crédibilité aux yeux de l’opposition. L’on se demande si elle pourrait bénéficier d’un minimum de crédibilité aux yeux de l’opinion nationale, de la communauté internationale.
La communauté internationale. C’est une communauté internationale qui suit de près l’élection présidentielle ivoirienne. Elle a pris les devant en mandatant plusieurs missions en Côte d’Ivoire. Ayant écouté les uns et les autres, elle estime qu’il ne lui revient pas d’interpréter les conditions d’éligibilité ivoirienne. Un blanc-seing semble avoir été remis au candidat sortant qui devra éviter des morts jonchant les rues. Une certaine pression devrait s’exercer sur le pouvoir issu de l’élection du 31 octobre en vue de sortir de ce climat de la paix par la peur.
Dr Sylvain NGUESSAN, Fondateur du Cercle de Réflexion Stratégique d’Abidjan